« Je me présente : Jake Kinsella » J’étais obsédée par son visage. Il avait ce je ne sais quoi qui me captivait. Il avait cette lueur dans le regard qui m’avait immédiatement faite tomber amoureuse de lui. En Afghanistan, je n’avais pas vraiment connu d’hommes. Je n’étais pas là pour éprouver ne serait-ce qu’un sentiment pour les hommes avec qui je travaillais. Bien sûr, il y avait eu Alec mais c’était différent, c’était mon meilleur ami et malgré tout l’amour que nous éprouvions l’un pour l’autre, ce n’était qu’un amour platonique. Alors que lui, il m’hypnotisait. Il devait simplement me vendre une maison ou un appartement. Et c’était ce qu’il avait fait. Il m’avait trouvé ce magnifique appartement duplex dans lequel je me sentais si bien, comme dans un cocon. Lorsqu’il m’avait présenté cet appartement, j’étais dans un tel état d’euphorie que je m’étais jetée sur lui. Littéralement hein. Je l’avais embrassé à pleine bouche. Il ne m’avait pas repoussée cet idiot, évidemment.
« Non, je suis désolée. J’aurais pas dû faire ça. » Je ne savais pas où j’avais trouvé la force de me reculer, je le voulais tellement. Il avait paru confus.
« Je… » Tentant de rester impassible, j’avais simplement ajouté.
« Tu… Vous êtes marié… Quand est-ce que je peux emménager ? »
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J’avais emménagé le soir même. J’essayais de ne plus penser à ce baiser. C’était une erreur. Une très agréable erreur, que j’aimerais beaucoup refaire, mais une erreur tout de même. Le lendemain, il avait tenté de m’appeler, je n’avais pas décroché. Et voilà, je n’ai plus eu de nouvelles pendant quelques jours. Finalement, il n’avait pas eu de mal à m’effacer. Je me commençais à me dire qu’il devait se montrer aussi charmant avec toutes les minettes qu’il croisait. Oui, je me considérais comme une minette dans cette situation. Cette fois, je n’avais plus l’impression d’être la militaire forte et sexy que j’étais en temps normal. Seulement voilà, je me trompais. Alors que j’étais habillée d’un short blanc et d’un t-shirt plutôt large, installée devant un film, quelqu’un frappa à la porte.
« Jake… J’veux dire Monsieur Kinsella. » Ça faisait une semaine qu’il n’avait donné aucun signe de vie, et il était là. Il eut un sourire.
« Jake, ça ira. » J’arquai un sourcil. Oui, d’accord, Jake, mais je me demandais toujours ce qu’il faisait là.
« Tu vas me laisser entrer. » Cette fois, je tombais des nus. Qu’est-ce qu’il attendait de moi au juste ? Qu’est-ce qu’il voulait ? Je le sus lorsqu’il s’approcha de moi. Au fur et à mesure qu’il s’approchait, je savais que je devrais le repousser, lui dire non mais je n’en avais pas la force. Alors, il avait posé une main sur ma hanche, l’autre sur ma joue et m’avait embrassée. Un baiser doux, comme si il me testait, voire si j’allais le repousser ou pas. Puis, il s’est fait plus pressant. Nous étions entrés dans l’appartement tout en nous embrassant. Lorsqu’il s’était écarté de moi, et m’avait regardée dans les yeux, j’avais détourné le regard, essayant de reprendre mes esprits.
« On ne peut pas. Tu es toujours marié. » Oui, il était toujours marié mais il m’avait raconté le chaos de son mariage.
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« J’adore ton second prénom. Willow. » La tête sur son torse, je souris. Même si je savais que la femme de Jake ne se privait pas de le tromper à tout va, je ne pouvais m’empêcher de ressentir une pointe de culpabilité parfois. Mais, il était tellement gentil avec moi. J’étais en train de tomber éperdument amoureuse de lui. Je n’avais jamais éprouvé ça pour personne. Quelle idiote ! Il fallait que je tombe amoureuse d’un homme marié. Dans le fond, je trouvais ça vraiment pathétique. Mais quand j’étais avec lui, j’étais tellement bien, tellement heureuse que j’en oubliais que ce que je faisais était mal. Depuis ce jour, il m’appela tout le temps –ou presque- Willow. J’aimais ça.
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« Willow, arrêtes ! » Je détestais quand il essayait de me calmer en m’appelant par mon second prénom. Cela faisait deux ans que ça durait. N’avais-je pas le droit à un peu plus de considération ? je voulais qu’il choisisse entre sa femme et moi. N’était-ce pas normal ? D’après lui, non.
« Non, ne fais pas ça, ne m’appelle pas Willow ! » Cette fois, j’étais en colère. Enfin, comme toutes les autres fois.
« Je peux pas te dire plus. Ma femme me trompe. Je la trompe. » Où voulait-il en venir ?
« Qu’est-ce que ça veut dire ? Que tu fais ça par pure vengeance ? Que je ne compte pas pour toi ? » Il s’était radouci, et s’était approché de moi.
« Tu sais bien que c’est faux. » Alors quoi ? Où est-ce que ça nous menait ? Il m’avait prise dans les bras.
« Tu sais, maintenant, elle me trompe exclusivement avec mon meilleur ami. » Je ne dis rien. Sa femme était une vraie garce.
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Et puis, nous avions continué à nous voir. Jake n’avait toujours pas pris de décision. Et quand je suis tombée enceinte, il y a un mois, je ne savais pas si je devais lui dire ou pas. Je savais qu’il avait toujours voulu des enfants mais que sa femme n’en avait jamais voulu. Egoïstement, je m’étais dit qu’en lui offrant cela, il me choisirait. Et puis, finalement, j’avais trop peur alors j’avais pris rendez-vous pour un avortement, sans trop y réfléchir en fait. Je n’avais pas le droit d’attendre un bébé de lui alors qu’il était marié à une autre. L’avortement devait avoir lieu il y a à peine quelques jours. Mais tout ne s’était pas passé comme prévu. Il y a deux semaines, je m’étais écroulée en pleine rue. Comme un air de déjà vu, je m’étais réveillée quelques heures plus tard à l’hôpital et je ressentais comme un vide. Un vide que le chirurgien qui m’avait opérée m’avait expliqué. « Vous faisiez une grossesse extra-utérine et votre trompe gauche a éclaté. J’ai fait tout ce que j’ai pu mais je n’ai pas pu la réparer. » Au moins la question du bébé était réglée. Je n’aurais pas de bébé, et je n’en aurais peut-être jamais. Voulais-je être maman ? Je n’en savais rien. Peut-être bien que oui, au fond… Vous savez, je viens à peine de sortir de l’hôpital, et je ne sais pas si je vais annoncer ça à Jake. Et si je le fais, je ne sais pas comment je vais lui annoncer.