Cela faisait près de un mois que j'étais arrivée dans cette ville du nom de Barrow. L'Alaska, je n'aurais jamais cru que l'on m'aurait envoyé ici pour tuer une personne en particulier. Parait-il celui qui avait été engagé n'avait pas rempli le contrat. On ne pouvait faire confiance en personne à présent. J'étais restée pendant tout ce temps dans mon appartement afin de procéder à un plan infaillible. Cela faisait sept ans que je jouais des jeux de rôles. J'optais pour l'amante séduisante, pour l'amie fidèle, pour la confidente qui vous plante un coup de couteau au final – et pas au sens figuré. J'avais eu la fiche de la prochaine victime et je me demandais comment j'allais l'a joué. Il me semblait que la petite nouvelle qui vient d'arriver, qui aurait besoin d'aide et qui viendrait une amie pouvait être un très bon plan. Il ne fallait que rien ne vienne l'entraver, même pas un soupçon de poussière. Tout ce qu'il fallait s'était être discret, sur ma vie, sur mes projets. Ce n'était pas difficile, j'avais toujours été mystérieuse et mentir était devenu une sorte de rituel. Ce matin là j'avais prévu de prendre mes repères à Barrow. Cette ville je ne la connaissais pas encore, le peu où j'étais sortie c'était à la supérette en bas de mon immeuble afin de ne pas mourir de faim. La télévision était allumée, il était onze heures et la météo annonçait qu'il allait faire froid. De toute manière il neigeait. J'enfilais un manteau avant de mettre un bonnet sur ma tête en polaire. Il était hors de question de geler dans les rues. Il fallait que je ne parle à personne, que je passe sans que l'on m'observe comme une femme invisible en somme. Je pris juste mon porte feuille et glissa un couteau dans la poche intérieur de mon manteau. J'en gardais toujours un, au cas où. Cela m'avait été utile plusieurs fois.

Les rues n'étaient pas spécialement bondées, il fallait donc faire encore plus de prudence. Il était néanmoins assez facile de se repérer. Après près de trente minutes à tourner à gauche ou à droite je commençais enfin à prendre quelques repères. Je n'avais même pas besoin de cartes, faut dire que j'avais toujours eu l'instinct d'orientation. Je passais devant quelques magasins, une épicerie et une bibliothèque avant d'apercevoir au loin, une tête familière. Du moins je crois. Ce n'était pas la fille que je devais éliminer. Non, c'était un visage du passé. Je ralentis, marchant à pas de loup en le suivant du regard. Qu'est ce qu'il faisait ici? Je décida de bifurquer dans une rue afin de prendre un raccourci. Pendant ma marche je réfléchissais à plusieurs éventualités. La première était que c'était lui celui qui n'avait pas rempli son contrat, mais je fis un sourire amusé. C'était impossible. Il avait toujours eu une volonté de fer et il ne pouvait pas faillir. Peut-être était-il sur un coup lui aussi? Hum. J'étais dans le brouillard quand je tourna enfin dans la rue qui axait à l'avenue principale. Je me cala contre le mur froid et je sentais mon souffle ralentir afin de me terrer comme un animal attendant sa proie. Mes bottes ne craquaient pas sur la couche fine blanche qui enveloppait la ville. J'attendais. Il passa tranquillement et enfin j'agrippai son manteau d'une main ferme et d'une poigne violente avant de l'attirer avec moi dans la rue et de le plaquer contre le mur. « Et oui surprise! » Je fis un sourire avant de le relâcher et de le regarder, restant toujours planter devant lui. Il était hors de question qu'il parte et me laisse ici dans cette rue qui était quand même assez sombre. « Sept ans. Je ne m'attendais pas à te voir ici. Tu es sur un coup? Tu devrais être plus vigilent, la preuve: j'ai réussi à t'attraper en deux secondes et je crois que tu ne t'ai pas aperçu que je te suivais depuis au moins dix bonnes minutes. » Je le regardais plus attentivement en approchant mon visage du sien puis m'éloignant. «Tu n'as décidément pas changé. »

J'avais esquissé un sourire au coin de mes lèvres en voyant sa tête. J'avais toujours eu des pas de félins sans faire un seul bruit afin de capturer ma proie le plus rapidement possible sans laisser la moindre trace. Je n'aurais fait aucun mal à mon fidèle et loyal ami qui était présent devant moi, sauf s'il le fallait bien sur. Je lui avais bien sous-entendu sept ans auparavant que si on n'avait jamais un contrat pour s'entretuer je serais la première à être gagnante. Il connaissait mes capacités, et je connaissais les siennes. Pourtant nous n'avions jamais travaillé ensemble sur un projet commun. Faut dire, j'expliquais toujours au patron qu'il était impossible pour moi de travailler en binôme, j'étais têtue et les coups partaient facilement. Peut-être, grâce à cet avertissement, cela l'avait empêché de perdre quelques employés. J'étais frigorifiée sur place, et pourtant si jamais l'occasion se présentait je pouvais partir ou mettre à terre une personne en une fraction de secondes. Depuis que j'étais gamine, j'avais eu des facilités dans tout ce qui était gymnastique et à présent on pouvait voir que j'avais une souplesse hors du commun en matière de combat. Je n'aurais jamais pensé me retrouver en Alaska. Ce qui était bien avec les missions c'est que l'on pouvait voyager, bien que étant adolescente je n'en pouvais plus de prendre l'avion. Or, ici, ce n'était pas pareille, je voyageais pour mon travail et ma vie en générale. Deux mois plus tôt j'avais savourer le soleil d'Australie. A présent, je gelais sous la neige de l'Alaska. J'aurais encore moins pensé me retrouver nez-à-nez avec mon ami Landon. C'était assez ironique, je venais pour finir un travail qu'un crétin n'arrivait pas à faire et voilà que je revoyais Landon. Peut-être que l'on avait été plusieurs à être mis sur le coup? Cela était probable. Après tout je ne connaissais en rien la victime à part quelques brèves informations sur sa vie en générale. J'avais rit légèrement à sa phrase avant de répondre d'un air sournois: « Je le suis encore plus. En sept ans j'ai grandement évolué. Aucun ne m'arrive à ma cheville. »

Je le connaissais, et même s'il me souriait je pouvais déceler autre chose qu'une joie de me voir. Or, je gardais tout cela pour moi-même. Je n'aimais pas poser de questions et surtout connaître les secrets rapidement, sinon cela n'avait aucun intérêt de fouiner. Après quelques minutes il me déclara qu'il m'avait repéré. J'avais rit quand il me dit qu'il avait plusieurs minutes. « Tu sais qu'une minute peut tout changer? Même une seconde? Je tue pour moins que ça, tu as de la chance que je t'aime bien sinon tu serais en ce moment en train de giser sur le sol. » Rien que ça. C'était pourtant la pure vérité, il me fallait peut de temps pour achever un des contrats qui m'étaient donnés. Je ne faillais jamais dans mon travail et j'avais toujours le droit à ma prime. Je commençais à geler sur place. J'avais beau essayé de me réchauffer le froid crispait mes muscles. Or, je pensais surtout à sa présence ici. Personne ne faisait un voyage en Alaska pour le plaisir, où alors il fallait être complètement fou. Il me répondit qu'il était ici pour un contrat enfin...en quelque sorte. Ces derniers mots me laissaient perplexe. « Comment ça en quelques sortes? Soit tu es là pour un contrat soit tu fais du tourisme, et je pense qu'un pays chaud est mieux pour cela. » Je réchauffais mes mains en les frottant entre elles tandis que mon regard était toujours posé sur mon ami. « Pour ma part, je suis ici pour un contrat. Figure toi qu'il y a un imbécile qui n'a pas été foutu d'éliminer une personne. Franchement je déteste ce genre de lâches. » J'avais arrêté de sourire. Rien que de penser qu'une personne n'avait pas fait son travail m'énervait. Si on ne s'en sentait pas capable, on abandonnait d'être un tueur à gage. « Je pense que si je sais qui c'est, je vais lui remettre les pendules à l'heure, mais pas sur qu'il s'en sorte... T'en pense quoi? »